Profondément liée à son activité de bergère et à son troupeau de moutons de race Lleyn, dans sa ferme de Wexford en Irlande, l’oeuvre d’Orla Barry s’inspire directement de son quotidien de « Bo-Peep punk » – bergère rebelle et féministe – et interroge avec humour et force les stéréotypes de genres et les images toutes faites que l’on se fait de la vie à la campagne.
Travaillant avec des matériaux naturels (la laine, la corne, le feutre ou le bois), elle met en avant les gestes traditionnels liés à ses activités, mais aussi les relations de soin et de confiance qu’elle entretient avec ses moutons.
Profondément ancrée dans son activité de bergère et son troupeau de moutons de race Lleyn dans sa ferme de Wexford en Irlande, l’œuvre d’Orla Barry propose une réflexion singulière sur les conditions de vie d’une « Bo-Peep punk » rebelle et féministe, subvertissant les stéréotypes genrés et les normes patriarcales qui façonnent les représentations de ce milieu, tantôt idéalisé tantôt invisibilisé. Attentive à l’économie des matériaux naturels utilisés dans son travail (laine, corne, feutre, bois) et aux gestes de la chaîne opératoire qui sous-tend la production de ses œuvres, Orla Barry met en lumière les relations de solidarité, de confiance et de care qu’elle entretient au quotidien avec ses « espèces compagnes » mais également d’interdépendance avec des structures économiques (vente aux enchères, compétition) qui conditionnent leurs existences.
Cette exposition réunit une sélection d’œuvres d’Orla Barry, articulée autour de l’installation performative Spin Spin Scheherazade (2019). Composée de divers modules, podiums, sculptures, d’une série de textes à la fois imprimés sur panneaux et diffusés sous une forme sonore, Spin Spin Scheherazade est activée à plusieurs reprises par la performeuse et collaboratrice de longue date Einat Tuchman. Plongée dans un récit mêlant autofiction, poèmes et anecdotes personnelles, le texte revient sur les situations, les obstacles et les dilemmes auxquels Orla Barry se confronte lorsqu’elle décide de se tourner vers une vie pastorale.
Retraçant les différentes étapes du cycle de reproduction, de sélection et de vente des moutons et témoignant du sexisme systémique au sein de cercles de sociabilité́ qu’elle côtoie, ces récits sont marqués par une sensibilité au monde singulière, façonnée par une forme de mutualisme que la philosophe Vinciane Despret et l’écologue Michel Meuret ont identifié comme vecteur d’apprentissages réciproques¹. À travers l’évocation de figures populaires (Shéhérazade, Raiponce, Bo-Peep²) et la polysémie d’un langage qui déjoue toute fixation sémantique, Orla Barry explore notre relation à la ruralité et ses cultures vernaculaires tout en interrogeant, avec humour, notre compréhension de ses réalités sociales, politiques et écologiques.
¹ Vinciane Despret et Michel Meuret, Composer avec les moutons. Lorsque les brebis apprennent à leurs bergers à leur apprendre, Avignon, Éditions Cardère, 2016.
² Bo-Peep est un personnage populaire anglo-saxon décrit dans la comptine « Little Bo-Peep » qui dresse le portrait d’une bergère qui a perdu son troupeau de mouton après s’être assoupie.