Natures molles, c’est aussi un geste : celui de sortir du cadre — littéralement. Depuis plusieurs années, France Bizot est fascinée par les réseaux sociaux, par leur langage, leur vitesse, leur manière de produire et de consommer les images. Elle a longuement dessiné à partir de ces flux, tenté d’en arrêter le mouvement, de comprendre ce temps qui défile trop vite, de le poser, de le ralentir. Cette exposition marque une forme de rupture : l’artiste choisit ici de s’affranchir de toute forme de cadrage — celui de l’écran, de l’image figée, de la toile tendue.
Les natures molles de France Bizot semblent flotter dans l’espace, suspendues ou simplement posées, comme libérées des contraintes habituelles. Le médium céramique, lui-même réalisé par l’artiste, s’expose telle une partie intégrante de l’œuvre : la courbe de la céramique épouse les formes peintes, créant une continuité visuelle et symbolique. Les objets ronds, eux-mêmes sans angles, renforcent cette sensation d’apesanteur, d’ouverture, de douceur. Natures mortes deviennent alors Natures molles — vivantes, mouvantes, méditatives.
En dialogue avec ces pièces, des œuvres murales sur panneaux de bois explorent les grands thèmes de la peinture classique — paysages, mains, objets — dans une approche qui interroge la matérialité, la lumière, le temps et l’ambiguïté de l’image. Ici encore, France Bizot déplace le regard : elle ralentit, observe, interroge la persistance d’un monde tangible face à l’évanescence numérique.
À travers Natures Molles, la peinture devient un espace de résistance silencieuse, un lieu où l’on observe autrement. Hors du cadre, au plus près des formes, de la matière et du réel.