En 2023, l’Institut a choisi de donner à voir l’effervescence culturelle que la Palestine ne cesse de révéler et d’entretenir : un cycle de trois expositions met en avant les artistes modernes et contemporains palestiniens, dans un dialogue avec leurs homologues du monde arabe et la scène internationale. Une programmation culturelle variée – concerts, colloques, ateliers, cinéma, rencontres littéraires –, rythmera cet événement de juin à décembre.
Les Palestiniens et Palestiniennes en leurs musées
Salles d’expositions temporaires (niveaux -1 et -2)
En apportant le monde en Palestine et en montrant la Palestine au monde, l’exposition croise deux projets palestiniens avec la collection du musée de l’Institut du monde arabe.
L’IMA abrite depuis 2016 la collection du Musée national d’art moderne et contemporain de la Palestine, une collection solidaire composée de dons volontaires d’artistes. Le choix d’œuvres exposées, dans la diversité des courants allant de l’informel à l’hyperréalisme, opère une rencontre de questionnements communs aux artistes et à leur futur public : que veut dire être humain, dans son corps et son identité, et que signifie vivre, pour soi et avec ou parmi les autres ?
Artistes exposés :
Hamed Abdalla, Jef Aérosol, Amadaldin Al Tayeb, Jean-Michel Alberola, François-Marie Antonioz, Mehdi Bahmed, Vincent Barré, François Bazin-Didaud, Serge Boué-Kovacs, Mustapha Boutadjine, Jacques Cadet, Luc Chery, Bruce Clarke, Alexis Cordesse, Henri Cueco, Marinette Cueco, Noël Dolla, Bruno Fert, Anne-Marie Filaire, Noriko Fuse, Garrigo Beatriz, Christian Guémy alias C215, Anabell Guerrero, Stéphane Herbelin, Mohamed Joha, Valérie Jouve, Ahmad Kaddour, Robert Lapoujade, Julio Le Parc, Patrick Loste, Ivan Messac, May Murad, Chantal Petit, Pierson Françoise, Ernest Pignon-Ernest, Samir Salameh, Antonio Segui, Didier Stephant, Hervé Télémaque, Marc Trivier, Jo Vargas, Vladimir Velickovic, Marko Velk, Gérard Voisin, Jan Voss, Fadi Yazigi, Stephan Zaubitzer et Hani Zurob.
Images de Palestine : une Terre sainte ? Une terre habitée !
Salle des donateurs niveau -2
Les deux registres d’images de cette exposition, prises au XIXe siècle et de nos jours, partagent un medium commun, la photographie, et une réalité commune, la Palestine. Pourtant, tout distingue ces deux ensembles par-delà leur « différence d’âge ». Ce sont deux modes du voir, deux conceptions de la Palestine. Mis en dialogue, ces deux regards montrent chacun à leur manière, la quête des Palestiniens vers la réappropriation, par l’image, de leur propre récit.
Le premier regard, orientaliste, aura de lourdes conséquences des décennies durant, faisant de la Palestine une Terre sainte, figée dans le temps, prisonnière d’un passé jamais révolu, promise à une quête infinie d’une gloire ancienne, en attente de ses « sauveurs « légitimes », missionnaires et colons, pour revenir à la vie. Cet ensemble réunit une trentaine de vues – paysages, scènes de genre et portraits – tirées selon le procédé Photochrom, qui permettait de coloriser des photographies en noir et blanc.
Breveté en 1889 par le Suisse Orelle Füssli, cette technique consistait à reporter le négatif d’une photographie sur des pierres lithographiques – jusqu’à 14 – dont la superposition des encres transparentes aboutissait à une impressionnante variété chromatique tout en autorisant des retouches. La société Photoglob Zurich, qui puisa sans vergogne dans les œuvres des photographes du XIXe siècle, commercialisa ces lithographies sous l’étiquette PZ, auprès des pèlerins et touristes venus en Palestine. Le procédé Photochrom fut supplanté dès 1910 par la mise au point de la pellicule couleur.
Les valises de Jean Genet
Quinze jours avant sa mort, en avril 1986, Jean Genet remet à son avocat Roland Dumas deux valises de manuscrits. Que contiennent-elles de si précieux ? Toute sa vie. À première vue, un fouillis de lettres, de factures d’hôtel, de notes sur tout et sur rien, sur la prison, l’écriture, l’homosexualité ou le cinéma. Mais elles abritent également les traces vives d’un compagnonnage de seize années avec les Black Panthers et les Palestiniens.
Une autre histoire s’y dissimule encore : l’histoire d’un écrivain qui, à l’âge de 50 ans, renonce à la littérature. Que fait-il alors de sa vie ? Et qu’est-ce qu’écrit un écrivain qui n’écrit plus ? À cette question, les valises apportent une réponse : malgré lui, malgré son vœu de silence et sa « bouche cousue », Genet écrit. Il écrit sur tout ce qui lui tombe sous la main, enveloppe, papier à lettre d’hôtel, bout de journaux déchirés… Partout, il griffonne sa vie.
Et, un jour, mystérieusement, de ces milles notes éparses, surgit le manuscrit d’une œuvre qui va conjuguer, comme aucune autre, littérature et politique, et nouer la grande aventure des Black Panthers et des feddayins avec le récit de la vie d’un vieil enfant de l’Assistance publique.
Un mois après la disparition de Jean Genet parait Un captif amoureux, le plus grand livre écrit par un auteur occidental sur les Palestiniens en lutte. C’est ce cheminement secret qu’éclaire cette exposition à travers des manuscrits jusqu’alors totalement inconnus. De cet itinéraire qui va du silence à l’œuvre symphonique, les valises donnent à lire les étapes, des premiers tâtonnements jusqu’aux reflets de sa rencontre avec le peuple palestinien, devenue sa préoccupation majeure et l’objet central de son livre testamentaire.
Outre les valises, sont également montrés le manuscrit et le tapuscrit des textes de Jean Genet qui commentent en toute liberté les photographies que Bruno Barbey (agence Magnum) a prises, « avec l’œil d’un témoin objectif », en Palestine entre 1969 et février 1971 ; ils ont été publiés dans le magazine de l’image Zoom, en août 1971.
Jean Genet n’a pas manqué de contribuer à la Revue d’études palestiniennes, notamment avec un puissant témoignage après les massacres dans les camps de réfugiés de Sabra et Chatila, en 1982. La Revue lui a rendu un vibrant hommage dans sa livraison d’avril 1997. Des épreuves de la couverture des numéros dans lesquels l’auteur est intervenu, illustrée par des artistes de renom – Alberto Giacometti, Etel Adnan, Kamal Boullata, Dia Azzawi – complètent l’accrochage.
Exposition coproduite par l’Institut du monde arabe et l’Institut Mémoires de l’édition contemporaine
Visites guidées
« Ce que la Palestine apporte au monde » se décline en trois volets. Laissez-vous guider par notre conférencière à tous les étages de l’IMA pour découvrir, dans les valises de Jean Genet, la relation particulière de l’écrivain avec la Palestine ; pour confronter des photographies de la Palestine d’hier et d’aujourd’hui ; pour admirer les virtualités possibles d’un futur musée de Palestine.
Dimanches 11-18 et 25 juin à 14h30 et à 16h | Dimanches 2, 9, 16, 23, 30 juillet et 20, 27 août à 14h30 |Tarifs : de 6 à 14 €