Dans sa quête, Fernando tente de démontrer visuellement, dans une écriture singulière, le fait que l’existence ne serait que spéculation, qu’une image ne serait pas visible entre deux temps donnés. Par le biais du mouvement, l’artiste utilise le temps comme un outil pour jouer formellement sur la variation, la multiplication et l’addition, la contraction et la distension, l’accumulation et la désagrégation. Il crée des images qui sont des schémas d’intention, des empreintes visuelles de toutes les décisions prises au cours du processus photographique. Le mouvement, la durée et l’accumulation sont des manifestations du temps. Le temps s’écoule avec voracité, déroulant une ligne sans fin de « maintenant » perpétuels.
C’est une abstraction puissante et pourtant nous la ressentons dans tous les aspects de notre vie et de nos pensées. Si nous vivons le temps comme une fugue ininterrompue et que nous savons que l’appareil photographique nous permet, dans une certaine mesure, de capturer ce mouvement, comment pouvons-nous l’utiliser pour révéler la persistance des choses qui nous entourent ? En d’autres termes, comment faire pour trouver les images que nous supposons exister entre les minces tranches d’existence que nous offrent les instantanés ? Ce sont ces interrogations qui poussent Fernando Marante à vouloir fixer la manifestation visuelle d’une idée, en transférant une spéculation née du langage dans un médium qui appartient au monde des sens.
Pour jeter un pont entre les deux réalités, chaque série commence par une possibilité : Que se passe-t-il si un objet est soumis à une réaction liée au temps ? Pour lancer le processus, l’artiste portugais construit des dispositifs temporaires pour induire un mouvement à des morceaux de papier, de plastique, de verre, de câbles métalliques ou de lumières, à l’aide de moteurs électriques, de ventilateurs ou de son propre corps. Et puis il attend qu’une image se produise, imprévisible. Ces variables incontrôlables génèrent ce qu’il appelle ses « images-hypothèses ». Ce qui l’intéresse, c’est de créer chez le spectateur la perception qu’il y a un processus. En fin de compte, chaque image est une carte des décisions qu’il prend en les créant et c’est là la seule narration qu’il autorise dans ses photographies.
Qu’il s’agisse des mobiles de Calder ou des œuvre optiques-cinétiques de Vasarely ou de François Morellet, l’art cinétique englobe une grande variété de techniques et de styles qui se chevauchent, et avec sa post-photographie, Fernando Marante approche les possibilités des matériaux, il questionne la mécanique de la visibilité tout en explorant ce qui reste entre le possible et le désiré.
Aux côtés des images de Fernando Marante seront exposées deux oeuvres de Hans Kooi, artiste de l’art cinétique représenté par la galerie Denise René.