Sur les traces des Jeux olympiques parisiens de 1900 et 1924

Focus

Mise à jour le 27/06/2024

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La flamme olympique est présentée lors d'un spectacle le 19 décembre 1967.
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Les Jeux de 1900 ont laissé peu de traces intramuros, il en va autrement de ceux de 1924, dont les Parisiennes et les Parisiens profitent de l’héritage… parfois sans le savoir. Cent ans après le début des Jeux de 1924, retour sur les deux premières expériences olympiques parisiennes.
Des Jeux olympiques à Paris en 1900… Mais alors, où sont passés les stades, les piscines, les gymnases ? Difficile en effet de trouver dans la capitale les traces concrètes des « Jeux de la deuxième olympiade », selon la terminologie officielle de l’époque. Il faut dire que ces Jeux ont une histoire particulière, qui explique en grande partie le peu de place qu’ils ont laissé dans l’histoire de l’olympisme… au grand dam du « père » des Jeux olympiques modernes, le baron Pierre de Coubertin.

En 1900, des Jeux pas vraiment olympiques…

Pierre de Coubertin (1863-1937), éducateur français, rénovateur des jeux Olympiques.
La décision d’organiser les Jeux à Paris est prise au 1er congrès olympique en 1894. L’honneur des premiers Jeux modernes, en 1896, revient à Athènes, capitale de la Grèce. Pierre de Coubertin, président du Comité international olympique, se réjouit d’accueillir cette deuxième olympiade à Paris en 1900, mais il doit subir de plein fouet la concurrence d’un autre projet : la tenue dans la capitale, la même année, de l’Exposition universelle.
Alfred Picard, commissaire général de l’exposition veut, lui, organiser dans le cadre de l’Expo, des « concours internationaux d’exercices physiques et de sports ». Pierre de Coubertin est furieux. Finalement un compromis intervient en 1899. Il est décidé que « Les concours de l’Exposition tiennent lieu de Jeux olympiques pour 1900 et comptent comme équivalent de la deuxième olympiade ». Résultat, les épreuves ne s’appellent pas « Jeux olympiques » dans les documents officiels, mais elles sont quand même assimilées à des Jeux olympiques… Le difficile art du compromis.
Cette polémique a des conséquences concrètes sur l’organisation de la manifestation sportive. Les Jeux s’étalent sur six mois de mai à octobre 1900, le temps de la durée de l’Exposition universelle. Y figurent également des épreuves non reconnues par le comité olympique : concours de ballon, pêche à la ligne, tir au canon…
Ce contexte particulier explique l’absence d’infrastructures dédiées aux Jeux de 1900. Il est en effet décidé que l’aménagement de sites réservés aux concours sportifs « entraînerait des frais de construction élevés et ne répondrait pas au but que l’on poursuit : la création de grands concours passagers sans dédoublement de l’Exposition elle-même ».

La Cipale, seul vestige des Jeux de 1900

Course des 100 km du meeting de l'exposition sur le vélodrome de Vincennes, le 13 septembre 1900
On peut tout de même signaler quelques vestiges. Il en va ainsi du « vélodrome municipal de Vincennes » - racheté bien plus tard par la Ville de Paris – inauguré en 1896 et qui prend rapidement le surnom de « Cipale ». En 1900, outre le cyclisme, s’y déroulent aussi notamment des épreuves de gymnastique, de football et de rugby.
La piste sera également utilisée pour les Jeux parisiens de 1924. De 1968 à 1975, c’est sur ce vélodrome qu’arrive chaque été le Tour de France. La « Cipale » prend le nom de « Vélodrome Jacques Anquetil » en 1987 et fait l’objet d’une importante opération de rénovation de 2012 à 2015. La piste pourrait encore être le lieu d’entraînement pour les Jeux parisiens de 2024.
Qui l’eût cru ? Le jardin des Tuileries (Paris Centre) a également servi d’enceinte pour les épreuves des Jeux de 1900. C’est en effet dans cet écrin de 25 hectares que se déroulent les combats d’escrime. Plus étonnant encore, la place de Breteuil (7e) accueille les épreuves d’équitation avec la construction d’un hippodrome provisoire.
Pas d’installations durables dédiées… pas de trace de ce passé, donc.
Mais alors, s’il n’y a pas de stade, où se sont déroulées les épreuves d’athlétisme reines des Jeux ? Au sein du bois de Boulogne, sur le site de la Croix Catelan dont le Racing Club de France est concessionnaire depuis 1886… et l’est toujours aujourd’hui. On installe à la va-vite deux tribunes de 600 places le long d’un terrain en herbe où les couloirs des athlètes sont tracés à la chaux.
Pour les autres épreuves, il faut quitter Paris. L’île de Puteaux accueille le tennis – épreuve ouverte aux femmes – au sein de la Société sportive de l’île de Puteaux, fondée en 1873, l’un des tout premiers clubs de tennis qui a vu le jour en France. Les compétitions de voile se déroulent sur la Seine, très exactement sur le plan d’eau de Meulan géré par le Cercle de la Voile de Paris. Le même lieu sera utilisé lors des Jeux de 1924.
Les concours de tir sont organisés sur le terrain militaire de Satory non loin de Versailles et il faut aller à Compiègne dans l’Oise pour suivre les épreuves de golf, car il n’y a alors aucun terrain plus proche de la capitale.

En podcast

Dans le premier épisode d’Enjeux, le podcast qui répond aux questions des Parisiens sur les Jeux, Ève Brunelle, cheffe de projet équipement à la délégation générale aux Jeux olympiques et paralympiques, et Eric Monnin, historien et sociologue du sport français interrogent l’héritage de l’édition de 1924 sur le plan matériel et immatériel, et abordent l’effet catalyseur des Jeux sur les travaux de reconstruction tout en retraçant la grande Histoire des Olympiades.

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Les installations de 1924, toujours présentes un siècle plus tard

Vingt-quatre ans s’écoulent, Paris retrouve les Jeux olympiques, dénommés officiellement « VIIIe Olympiades ». Pierre de Coubertin, toujours président du Comité international olympique, – il quittera ses fonctions à l’issue des Jeux de Paris de 1924 – est satisfait d’avoir réussi à imposer de nouveau la capitale après le semi-échec de 1900.
Cette fois, les organisateurs voient les choses en grand. De très nombreuses nouvelles installations dédiées à la pratique sportive vont émerger dans Paris et les communes limitrophes. Quelques-unes ont survécu.
À commencer par le stade de Colombes. À l’origine, en 1883, il s’agissait d’un hippodrome. Puis il a été partiellement transformé en stade en 1907. À compter de 1920, lorsque le célèbre Racing Club de France devient locataire du stade, les compétions de football, de rugby et d’athlétisme s’y enchaînent.

Le Racing Club de France impose Colombes

Stade Yves-du-Manoir, à Colombes
Le Racing pèse de tout son poids pour que le stade soit choisi, après agrandissement et rénovation, comme lieu central des Jeux olympiques. Colombes est en effet en compétition avec le stade Pershing (12e) et le Parc des Princes (16e). Mais la question budgétaire permet au Racing de l’emporter, le club assurant le financement de l’embellissement du stade, ce qui séduit les autorités olympiques et publiques. En échange, le club obtient 50 % des recettes des Jeux. Le nouveau stade de Colombes, conçu par l’architecte Louis-Faure Dujarric, permet d’accueillir 45 000 places dont 20 000 assises. Il est ultra moderne pour l’époque avec son éclairage électrique, ses vastes vestiaires, de l’eau chaude, une salle de presse sous les gradins. etc.
Le stade de Colombes est le lieu central des Jeux de 1924, accueillant non seulement les cérémonies officielles d’ouverture et de clôture, mais aussi de nombreuses épreuves tels le football, la gymnastique, l’athlétisme…
Le stade de Colombes est toujours là. Il a connu des hauts puis des bas avec la rénovation du Parc des Princes et la construction du Stade de France qui lui ont volé la vedette. Mais il a été rénové et il est même retenu pour accueillir les épreuves de hockey sur gazon.
À noter que c’est également à Colombes en 1924 que, pour la première fois à l’occasion des Jeux, fut édifié un village olympique pour accueillir les athlètes. Constitué de maisons en bois, il n’en reste plus rien aujourd’hui.

La piscine de Tarzan

Piscine des Tourelles
En revanche dans Paris intramuros, un autre site d’héritage des Jeux de 1924 perdure encore, sans que les petits Parisiens qui barbotent dedans le sachent forcément : la piscine des Tourelles – devenue Georges-Vallerey en mémoire d’un célèbre nageur qui s’y est illustré – dans le 20e arrondissement. C’est le premier bassin de 50 mètres à couloirs séparés par des lignes de bouchons de liège. Elle possède aussi des gradins où peuvent siéger 1 500 spectateurs.
En 1924, elle accueille les épreuves de natation et de waterpolo. Un athlète américain s’y illustre : Johnny Weissmuller. Il y remporte quatre médailles, dont trois en or. Mais c’est bien plus tard qu’il deviendra célèbre en incarnant à douze reprises au cinéma le rôle de Tarzan.
Entièrement rénovée dans les années quatre-vingt, la piscine des Tourelles/Georges Vallerey est toujours là. Sa charpente est actuellement en pleine reconstruction et le lieu servira encore lors des Jeux de 2024.
Dans l’Ouest parisien (16e), un autre site est encore visible : l’hippodrome d’Auteuil. Certes, il existe depuis 1873. Mais pour les Jeux de 1924, les tribunes ont été entièrement refaites et une piste de steeple a été créée.
Plus au nord de Paris (18e), le stade Bauer – du nom de Jean-Claude Bauer, médecin juif, communiste et résistant, arrêté en 1942 par la police française et fusillé – ancien stade de Saint-Ouen à sa création, puis rebaptisé stade de Paris en 1922, accueille toujours des compétitions sportives comme en 1924 où des épreuves de football s’y déroulèrent.

Le Vel d’hiv… pour ne jamais oublier

Course des 6 jours au Vél' d'Hiv, en 1924.
Enfin, on ne peut pas terminer cette énumération des sites laissés en héritage sans évoquer le Vélodrome d’hiver, le célèbre « Vel d’hiv ». Inauguré en 1910 dans le 15e arrondissement, il a été détruit en 1958. Mais son souvenir doit être maintenu pour des raisons totalement étrangères aux Jeux olympiques.
Certes, avec ses 17 000 places, il a accueilli notamment les épreuves de boxe durant les Jeux de 1924 et ensuite beaucoup d’autres manifestations sportives et populaires. Mais c’est à cause des évènements dramatiques qui s’y déroulent à l’été 1942 qu’il ne faut pas oublier le Vel d’hiv.
Il y a 81 ans, les 16 et 17 juillet 1942, une opération menée par la police française conduit à l’arrestation de plus de 13 000 juifs, hommes, femmes et enfants. Ils sont parqués dans des conditions inhumaines durant plusieurs jours dans le Vel d’hiv, avant d’être transférés dans des camps de transit puis déportés dans le camp nazi d’Auschwitz en Pologne. La plupart y furent assassinés. Une plaque commémorative est apposée boulevard de Grenelle (15e), sur l’emplacement de l’ancien vélodrome, pour ne jamais oublier.

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