Le saviez-vous ?

Ces métiers oubliés du Paris d'autrefois

Mise à jour le 04/03/2021
Matelassière ou cardeur de matelas sur les quais, Paris
Au XIXe et jusqu'au XXe siècle, les rues de Paris étaient des lieux de travail pour qui voulait gagner quelques sous. Chiffonniers, marchandes d'arlequin, tapeurs de vitres, étameurs… Malgré leur nom mystérieux ou poétique, leur réalité était plus prosaïque, entre dureté du travail et salaire minime. Eugène Atget et Louis Vert, photographes du XIXe siècle, ont immortalisé ces métiers d'antan. En voici une liste non exhaustive.
Quand on effectue des recherches sur les vieux métiers des rues de Paris, on tombe assez rapidement sur le nom d'Eugène Atget. Ce photographe français (1857-1927) est connu pour ses clichés sur le Paris de la fin du XIXe et du début du XXe siècle. Dès les années 1880 et jusqu’à sa mort, il a arpenté la ville et fait « un travail documentaire », comme il le disait lui-même. Il photographiait, directement dans la rue, les petits métiers qu'il voyait disparaître du fait de l'industrialisation ou l'apparition des grands magasins.
Marchand d'abat-jour, rue Lepic, Montmartre, 18ème arrondissement, Paris
Marchand d'abat-jour, rue Lepic, Montmartre, 18ème arrondissement, Paris
Crédit photo : Atget, Eugène (Jean Eugène Auguste Atget, dit) , Photographe CC0 Paris Musées / Musée Carnavalet
Peut-être moins connu que son contemporain, Louis Vert (1865-1924) a pourtant laissé lui aussi, une collection de photographies sur les métiers dans les rues. Il n’était pas photographe professionnel mais maître imprimeur. En 1904, il rejoint la Société d’Excursions des Amateurs de Photographies (SEAP) pour se perfectionner. Sa collection de petits métiers a souvent été projetée pour son double intérêt photographique et historique.
Ainsi dans l'inventaire de ces métiers, on trouvera, par exemple, marchands d'abat-jour, de nougats, de parapluie, de pomme de terre, de boissons ou de poissons mais aussi de papiers à lettres, de papier d'Arménie ou … de plan de Paris. La liste est longue de ces métiers aujourd'hui disparu. Focus sur dix d'entre eux.
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L'allumeur de réverbères

Nettoyeurs de réverbères, place du Parvis-Notre-Dame, 4ème arrondissement, Paris.
Nettoyeurs de réverbères, place du Parvis-Notre-Dame, 4ème arrondissement, Paris. A
Crédit photo : Vert, Louis , Photographe CC0 Paris Musées / Musée Carnavalet
Au XVIIIe siècle, les lanternes à chandelles réparties dans la capitale, à hauteur d’hommes, sont progressivement remplacées par des réverbères, à huile de colza. Leur allumage se systématise avec la création de la profession de falotier appelé communément « allumeur de réverbères ». Il a la tâche de les allumer et les éteindre, mais aussi de les nettoyer et les entretenir. Il travaille à l'aide d'une longue perche pour l'allumer ou l'éteindre. Pour le nettoyer, il appose son échelle à la barre d'appui prévu sur le réverbère.
Avec l’apparition des réverbères au gaz, au milieu du XIXe puis des lampadaires électriques en 1878, à l’occasion de l’exposition universelle, finis l’éclairage au gaz et les allumeurs de réverbères. Pour l’anecdote, un tout dernier réverbère au gaz subsiste à Malakoff. Il a été sauvegardé par une association de riverains qui l’a appelé Léon.

La marchande d'arlequins et la marchande de soupe

Marchande de soupe  dans une rue de Paris
Marchande de soupe dans une rue de Paris
Crédit photo : Vert, Louis , Photographe Pouzin, Marcel , Tireur de photographies CC0 Paris Musées / Musée Carnavalet
La marchande d’arlequins a un peu inventé le concept de la soupe populaire moyennant néanmoins quelques sous. En effet, cette marchande vendait dans la rue un repas qu'elle préparait à partir des restes des tables de familles bourgeoises et des grands restaurants, directement recueillis sur les assiettes. Ces débris étaient assemblés sur des plateaux et formaient un panachage de viandes, poissons et légumes qu’on achetait pour un ou deux sous. Privat d'Anglemont écrivain et journaliste français du XIXe siècle comparent ces plats à l'habit d'Arlequin, personnage de la commedia dell'arte apparu au XVIᵉ siècle en Italie et dont le costume est fait de losanges multicolores.
On trouvait aussi la marchande de soupes qui réchauffait les passants. On consommait sur place, dans les bols fournis par la cuisinière et récupérés ensuite.

Le fort des Halles

Fort des Halles, 1er arrondissement, Paris
Fort des Halles, 1er arrondissement, Paris
Crédit photo : Atget, Eugène (Jean Eugène Auguste Atget, dit) , Photographe. Musée Carnavalet, Histoire de Paris
Le fort des Halles avait pour mission de transporter les marchandises de l'extérieur vers l'intérieur des pavillons des anciennes Halles de Paris. Comme son nom l’indique, le fort portait des marchandises lourdes. Les charges plus légères revenaient au « portefaix ». Les forts étaient reconnaissables à leur grand chapeau de cuir avec une calotte de plomb pour protéger le crane. Ils étaient très considérés et avaient l'honneur de porter le muguet au président de la République chaque 1er mai.
En mars 1969, le transfert de l’activité des Halles vers le marché international de Rungis sonne le glas de leur corporation.

Le chiffonnier

Chiffonnier, avenue des Gobelins, 13ème arrondissement, Paris
Chiffonnier, avenue des Gobelins, 13ème arrondissement, Paris
Crédit photo : Atget, Eugène (Jean Eugène Auguste Atget, dit) , Photographe, Musée Carnavalet, Histoire de Paris
Le chiffonnier n'avait pas très bonne presse, considéré comme sale et vivant dans les déchets. Cependant, c'est un des premiers recycleurs. En effet, le chiffonnier arpentait les rues, muni de son crochet, afin de dénicher dans les ordures ménagères qui étaient alors jetées dans la rue, des objets réutilisables susceptibles d'être revendus. Au XIXe siècle, le chiffonnage prend un tel essor qu'une ordonnance de police est rédigée par Louis-Marie de Belleyme, préfet de police de Paris. Désormais, le chiffonnier est assujetti au port d’une médaille délivrée par la Préfecture de Police et devient une profession à autorisation.
Le 24 novembre 1883, le préfet de la Seine, Eugène-René Poubelle prend un arrêté relatif à l’enlèvement des ordures ménagères en imposant des boites à ordures à chaque occupant de logement. L'arrêté sonne la fin de la possibilité de jeter ses ordures dans la rue, annonce les débuts de l'industrialisation du recyclage et met à mal le métier de chiffonnier.

L'étameur ou le rétameur

Etameur  dans une rue de Paris
Etameur dans une rue de Paris
Crédit photo : Vert, Louis , Photographe Pouzin, Marcel , Tireur de photographies, CC0 Paris Musées / Musée Carnavalet
Le métier d'étameur et de rétameur consistait à préparer et réparer les ustensiles métalliques. L'étamage est l'action de déposer une couche d'étain (d'un autre métal ou d'un alliage) sur un ustensile, casserole, couvert, clou, bouton… afin d'en empêcher l'oxydation. Le rétameur quant à lui enlevait l'ancien étain afin de le refaire à neuf. Il rebouchait les trous des fonds de casseroles et ustensiles en fer blanc. L'étameur ou rétameur chargeait sur son dos et ses bras de multiples ustensiles pour aller ensuite se poser à un endroit pour y effectuer son travail.

La matelassière

Matelassières sur les quais de Seine
Matelassières sur les quais de Seine
Crédit photo : Vert, Louis , Photographe Pouzin, Marcel , Tireur de photographies. CC0 Paris Musées / Musée Carnavalet
Comme leur nom l'indique, les matelassières (ou matelassiers) confectionnaient ou réparaient les matelas. Les matelas étaient fabriqués avec de la laine et une toile à matelas. Ils avaient tendance à se tasser. Le travail du matelassier était alors de nettoyer la laine, éventuellement la changer et lui redonner du volume. Ce métier était le plus souvent installé en plein air du fait de la poussière. A Paris, les matelassiers se retrouvaient sur les quais de la Seine car leurs matières premières (laine, crin, plumes ) arrivaient par bateaux. Mais ils devaient demander une permission au commissaire du quartier « sous peine d’amende » pour carder les matelas, battre la laine ou le crin.

Le nettoyeur/tondeur de chien

Baigneurs de chiens  sur les quais de Seine
Baigneurs de chiens sur les quais de Seine
Crédit photo : Vert, Louis , Photographe Pouzin, Marcel , Tireur de photographies. CC0 Paris Musées / Musée Carnavalet
Les salons de toilettage pour animaux de compagnie sont une invention du XXe siècle. Avant cela, si on avait un chien, à Paris, c'est au bord de la Seine qu'on allait confier les soins de son toutou. Des hommes y tondaient les chiens avec des appareils manuels puis les lavaient… dans le fleuve. Cette activité était encore d’actualité au XIXe et au début du XXe siècle.

Le marchand d’herbe

Eugène Atget marchand d'herbe
Petit marchand d'herbes, place Saint-Médard, 5ème arrondissement, Paris
Crédit photo : Atget, Eugène (Jean Eugène Auguste Atget, dit) , Photographe, Musée Carnavalet, Histoire de Paris
Non, ce n'est pas l'herbe à laquelle on pourrait penser… l'herbe dont on parle ici était aussi appelé Mouron. Comestible, elle poussait en toute saison et était très appréciée des oiseaux. Dans les rues et les jardins publics, les marchand·e·s de mouron en vendaient en criant « Régalez vos petits oiseaux » !

La porteuse de pains

Porteuse de pain, rue Saint-Antoine.
Porteuse de pain, rue Saint-Antoine.
Crédit photo : Vert, Louis , Photographe Musée Carnavalet, Histoire de Paris
Si ce nom évoquera aux littéraires et cinéphiles le roman feuilleton éponyme de Xavier de Montépin (1823-1902) véritable "best-seller" du XIXe siècle, adapté successivement au théâtre, au cinéma et à la télévision, le métier de porteuse de pain n'avait rien de très romanesque. Ces femmes, levées aux aurores pour arriver dès l'ouverture de la boulangerie, prenaient dans leur carriole, souvent portée à bout de bras, une provision de pains pour aller les livrer avant le lever de leurs clients. Le métier se développe à Paris durant le XIXe siècle et s’éteint après la Première Guerre mondiale.

Le tapeur de vitres et la réveilleuse

Au début du XIXème siècle, bien avant l’invention des réveils individuels, smartphones ou autres applications, des hommes étaient embauchés pour venir réveiller les gens le matin. Munis d'un calepin avec toutes les adresses, le tapeur de vitres effectuait le tour des rues et toquait aux fenêtres des clients à réveiller. Pour les fenêtres en hauteur, il utilisait un sifflet et une perche ou il frappait à la porte. Il devait taper jusqu’à ce que son client se montre et prouve qu’il était bien réveillé. Très courants en Angleterre et en Irlande, les "knocker-upper" étaient plus rares à Paris.
Marchands aux Halles, 1er arrondissement, Paris.
Marchands aux Halles, 1er arrondissement, Paris.
Crédit photo : Vert, Louis , Photographe Pouzin, Marcel , Tireur de photographies Paris Musées / Musée Carnavalet
Cependant, Alexandre Privat d'Anglemont, connu pour ses deux livres « Paris anecdote » (1854) et « Paris inconnu » (1861), parle des « Réveilleuses » qui effectuaient une ronde très tôt dans la nuit, notamment aux alentours des halles. « La Réveilleuse, qui passe toutes les nuits à parcourir en tous sens les quartiers de Paris pour aller réveiller les marchands, les forts, les porteurs et les acheteurs de la halle, n’a que dix centimes par personne et par nuit. »
L'histoire ne le dit pas, mais qui réveillait le tapeur de vitres ou la réveilleuse ?
A consulter
L'illustration de cet article a été rendu possible grâce à la récente mise à disposition par Paris Musées, des œuvres conservées dans les musées de la ville de Paris. Les richesses documentaires de ces deux photographes sont en effet conservées au musée Carnavalet - Histoire de Paris, et sont pour certaines, en libre utilisation.
Le site des collections libres d'utilisation

A lire : Les allumeurs de réverbères, petits métiers de la débrouille, Privat d'Anglemont Alexandre, Paris anecdote, Paris, 1885 et Paris inconnu, P. Rouquette, Paris, 1886. Les petits métiers des rues (Français) Broché – 2015 de Roland André, Les petits métiers de Paris (Français) Broché – 2008 de Jean-Michel Le Corfec

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