Le pas appuyé, Mike salue tous les bénévoles de son large sourire. « C’est son anniversaire ! Il a 25 ans aujourd’hui », lâche Patrick qui l’accompagne à la distribution de petits-déjeuners. Devant la Médiathèque de la Canopée (Paris Centre), les équipes de la Chorba et la fondation Armée du Salut finissent tout juste d’installer les tables et les victuailles du petit-déjeuner.

Mike et Patrick sont les premiers bénéficiaires arrivés au rendez-vous matinal proposé par les associations, de 9 h 30 à 11 h 30. Depuis la chute des températures début décembre, Patrick accueille Mike chez lui, dans le 19^e. « Il dormait dans sa tente avant, je lui ai dit de venir chez moi. »

Comme l'an passé, les équipes de l'Armée du Salut et de la Chorba proposent des petits-déjeuners en place assise dans des lieux culturels parisiens durant l'hiver. La Gaité Lyrique, le Centre Pompidou, le Forum des Images, la Maison des Pratiques Artistiques Amateurs (MPAA) et la Médiathèque de la Canopée La Fontaine prêtent tour à tour leur lieu, en proposant également une découverte artistique. Plus de 7500 repas ont ainsi été distribués au sein de la Gaîté Lyrique pendant la première édition des petits-déjeuners solidaires, entre janvier et mai 2021.

Dès 8 h 45, une douzaine de bénévoles installent les tables et les chaises, préparent les stands de boissons chaudes, déballent les cartons de nourriture. Du pain avec de la confiture, une compote, une barre de céréales avec un pain au lait sont distribués à chaque bénéficiaire, sans condition d’inscription. Un repas froid préparé par Refuge Food à emporter leur est aussi proposé pour le midi. Deux bénévoles maraudent dans la Canopée pour inviter les personnes à la rue à rejoindre la distribution ou leur servir un petit-déjeuner.

Lors de ces distributions « Art&Food », des visites privées, des projections, des ateliers musique ou un accès à la médiathèque sont proposés aux bénéficiaires. « On ne nourrit pas seulement l’estomac, pose Matthieu Dahdah, coordinateur à La Chorba. Nous ouvrons les portes de ces lieux auxquels ils n’ont pas accès. À la médiathèque, nous allons créer ensemble un fanzine. »

L’année dernière, Odile a assisté à une visite privée des lieux avec des conférenciers au centre Georges-Pompidou. « Nous avons vu les robes Yves Saint-Laurent qui ne seront plus visibles au public », indique-t-elle. À côté d’elle, Samir assure l’ambiance. Leur table, c’est toujours « celle où on se marre le plus », résume Odile. Samir vient de Conflans-Sainte-Honorine (77) où il dort dans une tente. « C’est un artiste, il fait des percussions. Et surtout, c'est un clown ! »

À l’entrée de l’espace de restauration, Rémi, 31 ans, coupe des baguettes, les tartine de confiture. Le jeune homme entame sa deuxième semaine de permanence. Entre deux contrats de travail dans l’administration pénitentiaire, il met à profit son temps libre pour « se connecter un peu à la réalité, celle de la vraie galère de la vie quotidienne, de ceux qui sont à la rue ». Dès qu’il peut, il s’assoit pour prendre un café avec les bénéficiaires. « Je commence à en connaître bien, alors que je ne suis là que depuis deux semaines. Je sais qu’avec certains, on s’apprécie mutuellement. »

Denise, Nicole et Fatima se réchauffent avec le café servi à table. « C’est par le bouche-à-oreille qu’on a connu ce dispositif », confie Denise. Nicole s’inquiète de son train du retour, une bénévole consulte avec elle les horaires sur son smartphone. Elle est venue de Seine-et-Marne pour ce matin. « Ça nous fait des économies. Je n’ai pas une grosse retraite. Pendant onze ans, j’ai travaillé sans cotiser. Alors, c’est un peu de luxe, c’est agréable. »

Depuis début décembre, l’opération sert en moyenne une quarantaine de personnes tous les matins. « Nous allons arriver à 100-120 rapidement, estime Matthieu Dahdah. Nous servons des personnes à la rue, en foyer ou à la retraite. 20 % d’entre eux sont des femmes : c’est quatre fois plus que dans les autres dispositifs. Preuve que nous avons su créer une ambiance sécurisée. »

Le dispositif des petits déjeuners dans les lieux culturels de Paris « Art&Food » a reçu le soutien de la Ville de Paris pour continuer au-delà de la période hivernale. Ainsi, le 17 mars, lors d’une visite sur site, Léa Filoche, adjointe à la Maire de Paris en charge des solidarités, de la lutte contre les inégalités et contre l’exclusion, a annoncé la pérennisation du dispositif avec un budget annuel sanctuarisé.

Le format du dispositif est légèrement modifié dans l’attente d’atteindre son équilibre budgétaire en trouvant d’autres co-financeurs : suspension de la distribution de lunch box depuis la sortie de la période hivernale 2022-2023, passage de 7 jours/7 à 5 jours/7 (du lundi au vendredi) à compter du 1^er mai 2023, fermeture du dispositif en septembre 2023, pour 3 semaines (mais continuité sur juillet-août).

À compter du mois de mai 2023, le planning est le suivant :

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