Série

Ces anecdotes surprenantes sur le siège de Paris (5/5)

Mise à jour le 16/11/2020
"Départ de Gambetta pour Tours, sur l'Armand-Barbès, le 7 octobre 1870, à Montmartre".
Le siège de Paris n'a pas eu que des côtés tragiques. Parfois ironiques, parfois comiques, ces anecdotes témoignent de l'imagination et de l'inventivité des Parisiens pour résister à l'envahisseur.
Du siège de Paris, on a souvent retenu la famine, les rats et le pain noir. Mais qui se souvient des Amazones de la Seine, des pigeongrammes et des premières montgolfières ?

Les canons prussiens Krupp : objet d'admiration par les Parisiens en 1867

Exposition universelle de 1867. Canon Krupp exposé dans la grande galerie des machines. B.N.
Lors de l'exposition universelle de 1867, les canons Krupp sont exposés dans la grande galerie des machines.
Crédit photo : © Roger-Viollet
En 1867, dix millions de visiteurs parisiens, français et internationaux se pressent sur le Champ-de-Mars pour y admirer les dernières inventions technologiques. La 7e édition de l’exposition universelle s’y tient d’avril à novembre et attire des exposants du monde entier.
Le travail et l’industrie sont à l’honneur lors de l’exposition. À ce titre, les canons Krupp sont exposés et admirés de tous. Constitués d’acier, ces canons présentent l’avantage d’être extrêmement résistants. Mais les Parisiens ne se doutaient certainement pas que les canons Krupp se retourneraient contre eux quatre ans plus tard.
À noter également, le roi Guillaume Ier de Prusse et le chancelier Otto von Bismarck font partie des invités prestigieux reçus lors de l’exposition universelle de 1867.
Le siège de Paris a commencé à la mi-septembre 1870, mais les bombardements ne débutent qu’au début de l’année 1871. Cela n’est pas dû à la mansuétude des Prussiens mais plutôt à leurs difficultés à acheminer les pièces d’artillerie au plus près de Paris. Il était par ailleurs espéré que les Parisiens ne résistent pas aussi longtemps à la famine comme au siège.

Les Amazones de la Seine au secours de Paris

Betbeder Faustin. "Les femmes de Paris assiégé (Idylles et épopées) : Nos amazones de la Seine".
Les Amazones de la Seine n'ont pas vu le jour mais elles ont inspiré de nombreux dessinateurs et caricaturistes.
Crédit photo : © Musée Carnavalet/Roger-Viollet
Et si les femmes prenaient aussi les armes pour défendre la ville ? C’est du moins l’idée soutenue par le journaliste Félix Belly (1816-1886) dans les colonnes du journal La Liberté, le 3 octobre 1870. Les Amazones de la Seine, des bataillons constitués de femmes volontaires, voleraient au secours de Paris.

« Les femmes sont plus actives, plus éveillées, plus courageuses et plus sobres que nous. Elles supportent, dans le devoir de leur sexe et même dans les plaisirs du monde, des fatigues que nous ne supporterions pas. Elles ont surtout l’immense supériorité de ne pas fumer et de ne pas boire. »

Félix Belly (1816-1886)
Journaliste
Ce qui ferait d’elles « d’excellentes troupes d’avant-garde », ajoute le journaliste, qui s’autoproclame d’ailleurs chef provisoire du premier bataillon. La proposition connait un certain succès, des femmes se portent volontaires dès le lendemain de la publication. Mais l’idée n’est finalement pas retenue et les femmes ne participent pas aux combats.

Les pigeongrammes, nouvel outil de communication

Jules Didier (1831-1892) et Jacques Guiaud (1811-1876). "Les pigeons messagers". Huile sur toile, novembre 1870.
Jules Didier (1831-1892) et Jacques Guiaud (1811-1876) rendent hommage aux volatiles avec « Les pigeons messagers », en novembre 1870.
Crédit photo : © Musée Carnavalet/Roger-Viollet
Hier indispensables, aujourd’hui honnis, les pigeons ont pourtant rendu de précieux services pendant le siège. Dès leur arrivée, les Prussiens coupent les lignes de télégraphes et bloquent les services postaux. Les Parisiens avaient anticipé ces blocages et imaginé d’autres moyens de communiquer avec le reste du pays. Parmi les options retenues, les pigeons voyageurs figurent en bonne place.
Dès le début du mois de septembre, des pigeons sont acheminés vers Paris. Ils sont ensuite chargés de missives et de courriers qu’ils rapportent en regagnant leur colombier. Les messages qu’ils transportent sont miniaturisés, selon un procédé inventé par René Dagron. Rapidement, les pigeons voyageurs transportent aussi la correspondance privée entre les Parisiens et leurs proches.
Ce nouvel intérêt pour les pigeons donne lieu à des scènes cocasses, comme celle rapportée par le Figaro le 30 décembre 1870.
« L’autre jour, c’était rue de Rivoli : un pauvre pigeon, transi de froid, épuisé de fatigue et de faim aussi peut-être, s’était posé accablé sur la fenêtre d’un hôtel; — il n’en fallut pas davantage; — en quelques minutes, un rassemblement nombreux se forma, des gardes nationaux accoururent, et l’on appréhenda l’innocent oiseau que l’on prenait pour un messager. Qui sait ? Peut-être cachait-il sous son aile engourdie un bulletin de victoire, un rayon d’espoir — l’annonce de la venue prochaine d’une armée de secours … On s’empressa de le porter à l’hôtel des Postes. Et là, vérification faite, la déception fut bien cruelle. C’était un simple et vulgaire pigeon … qui n’apportait, hélas ! aucune dépêche ! »

Léon Gambetta s'envole en ballon pour Tours

Comment fuir Paris encerclée ? Les routes sont coupées, les chemins de fer contrôlés par les Prussiens et il n’existe pas de tunnels, à priori, pour s’échapper discrètement. Restent alors les airs. Les avions n’existant pas encore, c’est en ballon qu’il faut se déplacer. Le 7 octobre, Léon Gambetta, ministre de l’Intérieur, grimpe à bord du ballon Armand Barbès. Attaqué par les fusils et canons prussiens, l’aérostat doit rapidement prendre de la hauteur pour se soustraire au danger.
L’engin parcourt 98 km avant de terminer sa course dans les branches d’un grand chêne, près de Montdidier et d’Amiens. Dommage, puisque Gambetta souhaitait se rendre à Tours, où s’est retranché le gouvernement provisoire de la France. Il y parvient au terme de trois jours de calèche et marche à pied.
Les ballons permettent de s’échapper, mais leur manque de fiabilité en fait un moyen de déplacement très risqué. Les aérostats sont pris pour cible par les Prussiens, ce qui les contraint à prendre de la hauteur. Manœuvrer l'aérostat devient alors plus délicat, sans compter les vents capricieux qui emportent parfois les ballons au-delà des lignes prussiennes. Malgré tous ces dangers, 67 ballons quittent Paris durant le siège.

Le Vauban […] quitta la gare d'Orléans le 27 octobre, et tomba dans les lignes prussiennes, près de Verdun […], chargé des pigeons pour l'armée de Bourbaki, plus de 270 kg de dépêches.

G. Clerval

L'humour, meilleur moyen de résister à l'adversité

De l'humour noir mais de l'humour quand même. Tous les sujets du siège passent sous les crayons de dessinateurs et caricaturistes de l'époque. Nourriture bien sûr, mais aussi habillement, relations homme-femme, batailles, défaites, sans compter la question de l'honneur de la France, bafoué par la Prusse.
Ces illustrations témoignent non seulement de l'esprit gouailleur des Français mais aussi de leur désir de revanche, après avoir été humiliés par les Prussiens et par leur gouvernement.

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