Budget Participatif : faire émerger des idées avec des balades urbaines

Reportage
Mise à jour le 30/01/2024
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Vous avez jusqu’au 5 février pour proposer vos projets au Budget Participatif. En manque d’idées ? Marchez ! C’est ce qu’a proposé l’association Projets-19 aux habitants du 19e arrondissement au mois de janvier : déambuler dans les rues pour partager et concrétiser leurs propositions qui amélioreront leur quartier.
« À quoi pensez-vous pour améliorer votre quotidien ? » Panneaux solaires, éclairages, fresques, murs végétalisés, bricothèques, street workout, cafés solidaires, boîtes à livres… Depuis plusieurs années, grâce au Budget Participatif, de nombreuses réalisations ont vu le jour dans la capitale. En 2024 encore – et pour la dixième année ! –, les Parisiens sont invités à se saisir de cet outil.
Mais tous ne savent pas comment présenter leur proposition, formuler leur idée, rendre leur dossier le plus robuste possible et recevable, ou tout simplement se connecter sur Mon Paris, ni comment communiquer pour faire gagner leur projet lors du vote ! C’est là qu’entrent en scène, dans les quartiers populaires, des acteurs associatifs qui accompagnent et soutiennent des initiatives citoyennes.
Dans le 19e, Projets-19 aide les habitants des quartiers Stalingrad-Riquet, Michelet, Rosa Parks, Nantes-Barbanègre, Danube-Solidarité, Compans-Pelleport, Algérie et Chaufourniers. Ses chargés d’accompagnement et d’insertion ont organisé tout au long du mois de janvier des balades urbaines en lien avec des associations locales. « Notre travail, c’est d’abord de la pédagogie afin d’expliquer ce qu’est le Budget Participatif, ce qui rentre dans son cadre et ce qui n’y rentre pas, décode Nicolas Woronoff, directeur de Projets-19. Mais on a beau projeter des PowerPoint, le plus simple — et le plus sympa —, c’est de montrer concrètement les réalisations sur le terrain. »
Ces dernières années, après ces balades, les habitants ont déposé plusieurs projets très concrets : la rénovation des sols de la cité Michelet, la réparation de l’éclairage sous le périphérique à la porte de la Villette, la végétalisation de la rue Alphonse-Aulard et la réalisation d’une fresque participative porte des Lilas.

D’un hors sujet à un projet lauréat

En ce 24 janvier, rendez-vous à L’Accorderie, rue de l’Orme, avec une poignée d’« accordeurs », membres de cette association d’échange de services du quartier Algérie. La mission du jour ? Explorer les rues environnantes et faire surgir ça et là des projets qui répondraient aux besoins du plus grand nombre et amélioreraient la qualité de vie et le quotidien de tous.
Frédéric Boyer, historien, a construit une balade d’une heure dans ce quartier où il a grandi, entre les rues du Télégraphe, du Pré-Saint-Gervais, des Bois, de l’Inspecteur-Allés, du Docteur-Potain, de Romainville, du passage Monténégro et du boulevard Serrurier. Entre anecdotes croustillantes et histoires notoires, le petit groupe prend plaisir à commenter telle ou telle devanture, à regretter la disparition de certains commerces… et, bien sûr, à commencer à réfléchir aux projets qui pourraient bénéficier à leur quartier.
« Ce ne sont pas les idées qui manquent, il faut juste savoir les formuler », reconnaît Reyes, qui relaie à Nicolas Woronoff la proposition de l’une de ses amies : installer un abri à poubelles sur le trottoir devant son immeuble car il n’y a pas assez de place dans sa cour. « Ce genre de demande ne rentre pas dans le Budget Participatif, comme tout ce qui concerne la propreté de la voirie, les trous dans la chaussée, la sécurité ou la question des déplacements, précise le directeur de Projets-19. Cela peut décevoir certains habitants qui viennent vers nous avec des projets, mais on est là pour recadrer et expliquer ce qui relève des compétences de la Ville ou pas, et parfois les réorienter vers d’autres programmes comme Embellir votre quartier… »
Mais une idée « hors sujet » peut aboutir à une proposition tangible : les accordeurs parlent du besoin d’une navette pour rejoindre la place des Fêtes à partir du quartier Danube dans ce quartier « où il faut du souffle pour grimper ». Nicolas Woronoff leur propose de déposer une demande pour l’installation de bancs publics sur ce parcours, « ce qui permettrait de cheminer à son rythme et de se reposer si besoin ».

Transformer la Ville par petites touches

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Après une bonne heure de balade urbaine, retour dans les locaux de L’Accorderie pour un petit en-cas et un debrief. Monique – qui, au départ de la virée, affirmait qu’elle n’avait pas d’idées – a finalement repéré plusieurs recoins où l’on pourrait installer des jardinières. Et quid de ce kiosque à journaux qui semble abandonné à la sortie du métro ? Ne pourrait-on pas lui offrir une nouvelle vie en en donnant les clés à des associations qui y tiendraient des permanences ?
Thomas, médiateur à L’Accorderie, apporte également son point de vue : « Il y a près de chez moi un angle ouvert dans lequel les gens balancent leurs déchets. Je propose qu’on transforme ce bordel en surface de dons en créant un rack protégé où chacun pourrait déposer une planche, un tuyau, du plâtre… Une sorte de “matériauthèque” sur le même principe que les boîtes à livres pour les amateurs de bricolage. »

On peut se dire que d’ici le 5 février, c’est court, mais
c’est bien d’avoir une date butoir, cela permet de ne pas laisser traîner.

Nicolas Woronoff
directeur de Projets-19
Nicolas Woronoff anime les échanges et note les idées. Il rappelle qu’au minimum 25 % de l’enveloppe budgétaire du Budget Participatif bénéficiera aux quartiers populaires. Déposer un projet pour l’édition 2024, c’est aider à transformer Paris par petites touches. Il fait également part au groupe de la proposition d’une habitante, qui n’a pas pu se joindre à la balade, qu’il est en train d’accompagner pour rédiger son préprojet autour de la réfection du parc à chiens, notamment en matière d’éclairage et d’alimentation en eau. « Là, c’est certain, on rentre pile-poil dans le cadre d’un projet qui pourrait être lauréat du Budget Participatif. On va donc se dépêcher de le finaliser. On peut se dire que d’ici le 5 février, c’est court, mais c’est bien d’avoir une date butoir, cela permet de ne pas laisser traîner. »
Et les idées des accordeurs et accordeuses continuent à fuser : un projet d’embellissement de la place de l’Argonne, redonner un peu de vie au square Belleville-Télégraphe, pourquoi pas un nouveau jardin partagé, des boîtes à livres « plus grandes, mieux protégées »… Le sentiment d’avoir la capacité d’agir pour sa Ville, son quartier, est bien là.
Après le dépôt des projets, la Ville étudiera s’ils sont « recevables, robustes, réalisables et rassembleurs » avant d’être présentés en commission d’arrondissement, puis d’être soumis au vote des Parisiens. À suivre en septembre prochain !
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