Aoua Keïta

Au Mali, « Aoua » désigne une femme courageuse, en hommage à Aoua Keïta. Modèle d’indépendance, elle a combattu sur deux fronts qu’elle considérait indissociables : l’émancipation et l’unité des femmes, et la lutte anti-coloniale. Née dans une famille de filles, elle est désignée par son père pour être celle qui fera des études. Diplômée de l’école de médecine de Dakar en 1931, Aoua devient sage-femme, un métier qui va forger sa conscience politique alors qu’elle travaille au plus près de la réalité des femmes maliennes et sait ce qu’elles endurent. Son mariage en 1935 avec un médecin est aussi un moyen d’accéder à la politique, elle lit la presse et assiste aux réunions des hommes. Très vite, elle se syndicalise, devient membre en 1946 du parti anti-colonial, le Rassemblement démocratique africain (RDA) et organise elle-même des réunions clandestines de femmes dans sa maternité.

Toute sa vie, Aoua Keïta défend le droit des femmes mais aussi l’union des femmes d’Afrique. Elle est notamment à l’origine du Code de la famille qui fait valoir le consentement et s’oppose au mariage précoce, à l’excision et à la polygamie. Son désir d’unité donne naissance à l’Union des femmes du Soudan (UFS), terreau pour la création en 1959 d’une organisation panafricaine : l’Union des femmes de l’ouest africain (UFOA).

Seule femme membre du bureau politique de son parti, elle est élue cette même année députée de la Fédération du Mali à Sikasso. Jugée trop réformiste, Aoua Keïta est écartée du pouvoir par le Président Modibo Keïta en 1967, lui-même renversé l’année suivante par un coup d’État militaire. Il faudra attendre 1991 et les premières élections démocratiques pour que cette figure d’émancipation des peuples et des femmes soit réhabilitée.

Femme d’Afrique
Autobiographie d’Aoua Keïta, Présence africaine, 1975.

La lutte pour l’égalité femme-homme est toujours d’actualité au Mali. Selon le nouveau Code de la famille adopté par l’Assemblée nationale malienne en 2011 « la femme doit obéissance à son mari » et l’homme est consacré comme unique chef de famille. L’âge légal du mariage est de 18 ans pour l’homme et de 16 anspour la femme. Par ailleurs, dans certains cas, le mariage peut être autorisé à partir de 15 ans. Le mariage religieux est désormais juridiquement reconnu.