« De 1898 à 1946, la France a administré une étrange petite possession, le territoire à bail de Guangzhouwan, situé en
Chine du Sud, à mi-chemin entre Hanoi et Hong-Kong. Alors que cette "location" n’aurait dû prendre fin qu’en 1997 (à
l’instar de sa consœur britannique), elle fut rétrocédée dès la fin de la Seconde Guerre mondiale, faute d’avoir
convaincu les autorités métropolitaines de son intérêt. L’étonnante trajectoire de cette colonie quasi-clandestine peut
nous en apprendre beaucoup, tant sur le rapport de la France à l’Asie orientale que sur le fonctionnement du système
colonial français. Après avoir précisé les moments clés de cette tranche d'histoire, nous essayerons de dégager les
caractéristiques du statut juridique et politique si singulier de ce Territoire, avant d’examiner les deux grandes stratégies
politiques et économiques qui ont présidé à son développement, mais l'ont aussi contrarié. Nous verrons en particulier
le rôle qu’y a joué le commerce (légal et illégal) de l’opium, dont la concession était devenue un important emporium.
Enfin, nous tenterons d’éclairer les raisons qui ont concouru à brider le développement économique local et à la quasi-insignifiance de l’empreinte française dans cette région du monde, contrairement à ce que le Royaume-Uni a su
produire à Hong Kong. L’histoire de Guangzhouwan, cette « colonie avortée », porte ainsi trace des rigidités, failles et
impasses du modèle colonial tricolore en Asie orientale au cours du premier XXe siècle. ».
Né le 21 septembre 1964 à Chambéry, France, Antoine Vannière est un professeur d'histoire dans les Classes Préparatoires Littéraires aux Grandes Écoles au lycée Thiers à Marseille. Agrégé en histoire en 1989 et titulaire d'un doctorat en histoire de l'Université Paris-7 Denis Diderot en 2004, sa thèse portait sur le territoire à bail de Guangzhouwan en Chine. Il a publié un ouvrage intitulé "Kouang-Tchéou-Wan, colonie clandestine : un territoire à bail français en Chine du Sud, 1898-1946", ainsi que divers articles et communications sur le sujet. Ses travaux se sont concentrés sur l'histoire de Guangzhouwan et de la colonisation française en Asie orientale, lui valant une reconnaissance académique.