Focus

L'engagement des étrangers dans la Grande guerre

Mise à jour le 22/10/2018
Jardin d'agronomie tropicale de Paris
600 000 soldats des troupes coloniales et 500 000 travailleurs étrangers ont été engagés dans le premier conflit mondial. Les traces de cette mobilisation sont à découvrir au Jardin d'agronomie tropicale dans le Bois de Vincennes (12e).
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Ils ont découvert la métropole par ses champs de bataille et ses usines. De 1914 à 1918, près de 600 000 soldats des troupes coloniales, sont appelés par la France pour combattre. 70 000 ne reverront jamais leur terre natale d'Afrique ou d'Asie, et perdront la vie durant ce premier confit mondial. Et 500 000 travailleurs participeront à l'effort de guerre sur le sol français, dont 200 000 issus de l’Empire britannique.
Jardin d'agronomie tropicale
Jardin d'agronomie tropicale
Crédit photo : F. Grunberg/Mairie de Paris

Un hôpital et une mosquée dédiés aux troupes coloniales

Une exposition gratuite, réalisée par l'association Génériques, organisée en 2018, retraçait leur itinéraire. Et le lieu, le Jardin d'agronomie tropicale, ne doit rien au hasard. Ce très beau jardin, implanté dans le bois de Vincennes (12e), face à Nogent-sur-Marne (Val-de-Marne), accueillait en 1907 une grande exposition coloniale.
Jardin d'agronomie tropicale
Jardin d'agronomie tropicale
Crédit photo : F. Grunberg/Mairie de Paris
En 1916, l'hôpital de guerre, créé sur place au début du conflit, est entièrement dédié aux blessés des troupes coloniales. La même année, "la première mosquée de métropole y a été construite, dix ans avant la construction de la Grande mosquée de Paris", rappelle Amar Nafa, directeur de l'association Génériques (l'association a fermé ses portes en 2018).
Amar Nafa, directeur de l'association Génériques
Amar Nafa, directeur de l'association Génériques
Crédit photo : F. Grunberg/Mairie de Paris
Le lieu de culte sera désaffecté après la fin du premier conflit mondial.
Jusqu'à sa fermeture, 4813 soldats sont pris en charge à l'hôpital. En 1920, un premier monument rendant hommage aux troupes venues de l'Empire, est érigé dans le jardin. Puis, une série d'autres stèles voient le jour : à la mémoire des "Indochinois chrétiens" (1921), en hommage aux soldats malgaches (1925), aux "Cambodgiens et Laotiens morts pour la France" (1927) mais aussi pour les "soldats noirs morts pour la France" (inaugurée en 1940).
Monument en l'honneur des soldats malgaches dans le jardin d'agronomie tropicale
Monument en l'honneur des soldats malgaches dans le jardin d'agronomie tropicale
Crédit photo : F. Grunberg/Mairie de Paris
Cette reconnaissance restera très souvent symbolique. Le combattant issu de l'Empire, malgré sa valeur sur les champs de bataille, reste un sujet colonial. En position subalterne.

Monument en hommage aux soldats noirs dans le Jardin d'agronomie tropicale
Monument en hommage aux soldats noirs dans le Jardin d'agronomie tropicale
Crédit photo : F. Grunberg/Mairie de Paris
Dans le bois de Vincennes, l'armée soigne à partir de 1916 uniquement les blessés issus de l'Empire colonial. Car elle veut limiter au maximum les contacts avec les habitants de métropole. "C'est une conception racialiste, explique Amar Nafa, où chacun est séparé en fonction de son origine", Malgaches, tirailleurs sénégalais, Indochinois… Pourquoi cette séparation avec les métropolitains ? L'Etat français craint notamment "la contagion des idées" entre population hexagonale et peuples colonisés, qui découvrent, par exemple, la liberté d'expression au pays de Voltaire et de Rousseau.
Certains soldats indiens sont soignés en Angleterre. Témoignage en images avec cette "une" de l'Excelsior du 14 novembre 1914.
Guerre 1914-1918. Un camp d'Indiens blessés. Paru dans l'Excelsior, 14 novembre 1914. [Couverture]. Impression typographique.
Crédit photo : © BHVP/Roger-Viollet

500 000 travailleurs étrangers… tombés dans l'oubli

Guerre 1914-1918 : femmes et ouvriers chinois travaillant dans une usine française d'armements
Guerre 1914-1918 : femmes et ouvriers chinois travaillant dans une usine française d'armements
Crédit photo : Albert Harlingue/Roger-Viollet
"La France a fait venir des travailleurs étrangers pour faire tourner les usines, notamment d'Asie (Indochine, Chine…), précise Amar Nafa. Mais tout a été fait pour limiter au maximum les contacts avec les habitants de métropole". Une fois la guerre achevée, l'Etat "s'est dépêché de les renvoyer chez eux", par crainte de créer des tensions sur le marché du travail. Le rôle majeur de ces 500 000 travailleurs tombe ensuite dans l'oubli.
Récépissé d’une carte d’identité et de circulation (travailleurs agricoles) délivrée le 28 décembre 1918 par le Commissariat spécial de la frontière, Le Perthus (Pyrénées-Orientales)
Récépissé d’une carte d’identité et de circulation (travailleurs agricoles) délivrée le 28 décembre 1918 par le Commissariat spécial de la frontière, Le Perthus (Pyrénées-Orientales)
Crédit photo : Coll. Génériques
Pendant la Première Guerre mondiale, le contrôle des travailleurs étrangers est strict : chacun est rattaché à une préfecture et à un secteur d'activité. En 1916, tous les travailleurs coloniaux et étrangers doivent se munir d’un titre d’identité et de circulation. Puis une carte d’identité d’étranger est instaurée en avril 1917. Ce document, conservé dans l’après-guerre, jouera un rôle essentiel dans l’histoire du contrôle des étrangers en France.

45 000 Allemands et Austro-Hongrois internés

Autres oubliés de la mémoire collective : les populations internées sur le territoire français. L'exposition du Jardin d'agronomie tropicale évoque la situation des 45 000 ressortissants des pays "ennemis" : ces citoyens, en majorité allemands et austro-hongrois sont enfermés sans jugement, dès l’été 1914 par la France. Parmi elles, de nombreuses familles.

Infos pratiques

Le jardin est situé dans le bois de Vincennes (12e).
45 bis, avenue de la Belle-Gabrielle - RER A : Nogent-sur-Marne

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