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Covid-19 : des associations accompagnent l'école à la maison

Mise à jour le 26/05/2020
L'école à la maison
La fermeture des établissements scolaires s'est traduite par de multiples difficultés matérielles pour certains élèves à suivre l'école à la maison. Deux initiatives menées par des associations, #Réussitevirale et #Ongardelelien, visent à soutenir les jeunes les plus fragiles afin qu'ils restent sur les rails.
Avec la fermeture des écoles, collèges et lycées ces derniers mois, la continuité pédagogique s'est notamment mise en place autour des outils numériques. Enjeu majeur de cette situation inédite : le risque d'un accroissement des inégalités scolaires, entre ceux qui disposent des moyens pour l'école à la maison - à savoir de la place, une bonne connexion Internet et un ordinateur personnel - et ceux qui ne sont pas équipés.

Garder le lien contre les inégalités

Engagée dans la lutte contre les inégalités scolaires, l'association de la fondation des étudiants pour la ville (Afev), s'est mobilisée dès l'annonce du confinement. « Nous avons téléphoné aux 300 familles dont nous accompagnons les enfants à Paris pour faire le point, retrace Judith Baudrillat, déléguée territoriale de l'Afev Paris. Nous leur avons demandé si elles étaient équipées pour assurer la continuité pédagogique, si elles ont des ordinateurs, une bonne connexion Internet et un endroit calme pour se concentrer. Pour certaines familles, notamment monoparentales, qui logent dans une petite surface avec plusieurs enfants, c'est compliqué ».
En « temps normal », les quelque 350 étudiants bénévoles de l'antenne parisienne soutiennent des enfants de l'école primaire au collège, deux heures par semaine à domicile. Il peut s'agir autant de redonner confiance à l'élève, de l'aider dans ses leçons que de partager des sorties culturelles. Dans l'urgence de la crise sanitaire, l'association a notamment été sollicitée par les travailleurs sociaux pour faire de l'accompagnement à distance. « Nous nous y attendions pas du tout, c'était pas du tout dans nos process. Mais nous allions tenter l'expérience, à savoir accueillir de nouveaux bénévoles pour créer des binômes avec les enfants qui n'allaient jamais se rencontrer physiquement. D'habitude, pour mobiliser de nouveaux étudiants bénévoles, nous nous rendons sur les campus, tenons des réunions d'information et des formations, nous organisons des rencontres avec les familles et les enfants… »

En complément de l'école

Pour répondre à ces « besoins criants », l'Afev Paris a recontacté ses anciens bénévoles, lancé un appel sur la plateforme jemengage.paris et demandé à ses étudiants s'ils pouvaient prendre sous leur aile un deuxième élève. L'opération #OnGardeleLien a alors pris forme. Elle vise à lutter contre le creusement des inégalités éducatives en accompagnant 10 000 jeunes au niveau national et en équipant d'ordinateurs ceux qui en avaient besoin, grâce à un partenariat avec Break Poverty. « Nous avons vite arrêté de communiquer sur le recrutement car nous avons été surpris par la vague de solidarité. En trois jours, à Paris, on avait déjà 80 nouveaux bénévoles », se félicite la déléguée territoriale.
Les neuf salariés de l'association constituent des nouvelles « paires » étudiants-jeunes pour des suivis au téléphone ou en visioconférence deux heures par semaine, cette fois-ci plus orientés sur l'aide aux devoirs que les accompagnements individualisés. « C'est en complément de l'école. Certains professeurs sont très présents, d'autres moins. Pour les enfants, ces deux heures offrent une petite vue sur l'extérieur, la possibilité d'extérioriser et de se confier. C'est aussi une manière de décharger les parents, sur qui repose la continuité éducative, détaille Judith Baudrillat. Avec l'étudiant bénévole, ils se connectent sur l'espace numérique de travail, regardent les leçons, posent des questions. C'est aussi l'occasion de leur apprendre à prioriser les choses et à s'organiser. »

Engendrer la #Réussite virale

Si l'Afev s'adresse aux enfants de 5 à 15 ans, l'initiative #Réussitevirale visait dans un premier temps les lycéens. Trois jours après la fermeture des établissements scolaires, Article 1, association pour l'égalité des chances, et la fédération générale des associations étudiantes (Fage) ont lancé #Réussite virale pour venir en aide aux élèves issus de milieux défavorisés ou aux parents mobilisés sur le front de la crise.
Ce « tutorat d'urgence » a pour objectif d'appuyer les élèves sur des points de cours ou devoirs qu'ils trouvent problématiques, de leur donner des conseils de méthodes et de les aider à rester motivés. « Nous avons pour objectif de suivre 5000 jeunes, avec des collégiens désormais. À mi-parcours, nous sommes à 2500 sur toute la France, se réjouit Amélie Nicaise, responsable du pôle orientation d'Article 1. À distance, nous mettons en relation des élèves avec des bénévoles de manière à ce que le binôme fonctionne au mieux, au moins jusqu'à l'été. »
Comme sa consœur de l'Afev, Amélie Nicaise n'a pas eu de mal à trouver de nouveaux volontaires, constatant « un élan de solidarité des étudiants et des professeurs pour s'engager ». #Réussite virale s'adresse aux « jeunes dont les parents travaillent, à ceux qui se retrouvent dans des petits appartements avec un seul ordinateur pour toute la famille. » C'est pour ces élèves « un peu fragiles » qu'elle veut « garder dans la dynamique et redonner confiance » que s'est bâtie l'opération. Les binômes se fixent des rendez-vous virtuels, au téléphone ou en visio. L'appui est surtout d'ordre méthodologique : c'est l'occasion de faire le point sur les devoirs, ce qui a été fait ou non, les échéances à venir. « Présenter cela à son tuteur, cela oblige à structurer les choses, à s'organiser, se motiver », pointe Amélie Nicaise.

Le confinement accentue les difficultés

Jordan Ravindirane, 24 ans, bénévole depuis janvier 2018 à Article 1, s'est lancé dans le soutien scolaire à distance fin mars. Il suit Clémentine, en Terminale L, « lycéenne à la ramasse » selon le premier e-mail de la jeune fille. Étudiant en Master 2 à EM Lyon, Jordan fait valoir ses compétences acquises notamment en classe préparatoire pour soutenir Clémentine en philosophie, histoire et lettres. « Tous les deux jours, je donne une session de soutien d'une heure, à 19h, par messages. Une demi-heure avant, on fait le point sur ce qu'elle aimerait aborder, ce qui me laisse un peu de temps pour préparer la séance. Puis, on échange sur les notions du cours sur lesquels elle a des difficultés, par exemple, en histoire, c'est le chapitre gouverner la France depuis 1946, en lettres, la pièce Hernani de Victor Hugo », expose l'étudiant en recherche de stage. « Je lui demande des définitions, on se fait des questions-réponses sur les concepts du contrat social par exemple ». Sans interactions avec les professeurs ni soutien des camarades, le confinement a « accentué ses difficultés », estime l'étudiant en Master 2, qui se prépare au métier d'analyste financier en développement durable. Fier de « redonner ce qu'Article 1 (lui a) donné auparavant », Jordan Ravindirane s'investit pour « faire baisser les inégalités sociales dans l'éducation » pour qu'émerge « un leadership plus éthique et plus inclusif ». C'est donc avec « plaisir » qu'il revoit certains chapitres pour son soutien à Clémentine.

Crainte de ne pas avoir le niveau l'année prochaine

Cette dernière, comme les autres Terminales de sa génération, ne passera pas l'examen du bac cette année. Celui-ci n'étant validé que sous la seule forme du contrôle continu, sur décision du ministre de l'Education Nationale.« Le baccalauréat reste une étape symbolique en France. Le fait de ne pas avoir à le passer, contrairement à toutes les générations précédentes, a pu soulager dans un premier temps certains lycéens. Mais il leur fait craindre d’être moins légitimes pour la suite de leur parcours, surtout que l’organisation des cours à distance a également impacté les programmes et que la valeur du contrôle continu peut être considérée comme différente selon les lycées », expliquent Benjamin Blavier et Boris Walbaum, co-fondateurs de Article 1.
D'après un sondage réalisé par l'association auprès de Terminales, 42,2% craignent de ne pas avoir le niveau requis à la rentrée prochaine. Près de 12% ont modifié leur choix d'orientation à cause de la crise. Un quart d'entre eux (22,9%) craignent de ne plus pouvoir financer leurs études (prêts étudiants non accordés, jobs annulés, alternance plus difficile à trouver). Parce que les inégalités ne se confineront, sans doute, pas au confinement.

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