Reportage

Mam’Ayoka, une cuisine du monde qui a du cœur

Mise à jour le 19/04/2019
Sophie Lawson et Hannan, Mam'Ayoka
Ouverte en février 2016 place Pierre-Mac-Orlan (18e), la cantine solidaire Mam’Ayoka emploie dix femmes en CDI en tant que cuisinières. Toutes étaient éloignées de l’emploi et la plupart sont mères de famille. Au menu, des recettes typiques de leur pays d’origine. Un projet proposé lors du Budget participatif 2016, mis en œuvre grâce aux votes des Parisiens.
Tables en palettes colorées, véranda lumineuse, atmosphère chaleureuse, le restaurant Mam’Ayoka charme d’emblée. Le concept de cette coopérative solidaire : embaucher des femmes éloignées de l’emploi pour cuisiner des plats de leur pays d'origine. Le menu change tous les jours, selon la disponibilité des produits et l'inspiration des cuisinières.
Hannan
Hannan/Mamayoka
Crédit photo : François Grunberg / Mairie de Paris
Viande, poisson, mais aussi option végétarienne et légumes sont servis dans des bocaux maintenus au chaud dans un bain-marie, disposé sur un comptoir en libre-service. Pour les plus pressés, il est même possible d’emporter son bobun ou son tajine de veau dans un bocal consigné.
Gérante et fondatrice de Mam’Ayoka, Sophie Lawson (photo ci-dessous) était cheffe de projet chez Orange lorsqu’elle a eu envie de changer d’air et de trouver un « emploi qui a un impact social ». C’est à l’occasion d’une visite de la cousine de son mari, originaire du Mali, que l’idée de Mam’Ayoka germe dans son esprit. « Elle cuisinait si bien que des voisins et connaissances venaient acheter ses plats directement à la maison », s’amuse Sophie, un verre de jus de bissap à la main, boisson à base de fleurs d’hibiscus et de sirop de canne à sucre.
Sophie Lawson Mamayoka
Sophie Lawson Mamayoka
Crédit photo : François Grunberg / Mairie de Paris
Sophie réalise alors que de nombreuses femmes, immigrées de plus ou moins longue date, n’ont pas forcément l’expérience professionnelle pour trouver un travail, ni parfois la force de se confronter à la recherche d’emploi. « Cela était rendu encore plus difficile lorsque la maîtrise du français faisait défaut ou lorsque le cercle social était très restreint », ajoute l’entrepreneuse. En créant Mam’Ayoka, elle a donné sa chance à des femmes éloignées de l’emploi, mais pas dépourvues de talent culinaire.
D’une certaine manière, Mam’Ayoka a aussi donné sa chance à Sophie. Grâce à ce projet pour lequel elle ne compte pas ses heures, elle a découvert de nouveaux univers dont elle ignorait tout : le monde de l’insertion professionnelle, de l’entrepreneuriat et de la restauration qui exigent de solides compétences managériales. Pari réussi, comme en témoigne l’enthousiasme de Madjda (photo ci-dessous), Emmanuelle et Hannan. Toutes les trois partagent cette même « fierté de participer à un projet solidaire qui leur ressemble et qui les motive », assure Emmanuelle, la responsable traiteur.
Madjda - Mam'Ayoka
Crédit photo : François Grunberg / Ville de Paris
Avant de devenir pâtissière, Madjda a d’abord été cuisinière, puis responsable des commandes avant de devenir pâtissière. « Madjda fait partie des murs », sourit Hannan, la cheffe de cuisine. « Faire des gâteaux, c’est ce qui me plaît le plus », nous confie-t-elle en nous apportant du thé à la menthe et de délicieux moelleux au chocolat et aux noix (photo ci-dessous). Avant de se lancer dans l’aventure, Madjda était femme au foyer et se consacrait à ses trois enfants. Elle avait bien fait un stage en informatique, mais « rester assise devant un ordinateur ne [lui] convenait pas ». Elle prépare maintenant un CAP en pâtisserie, avec le soutien et l’accompagnement d’Hannan et de l’équipe de Mam’Ayoka.
Mamayoka
Crédit photo : François Grunberg / Ville de Paris
Quant à Hannan, elle a travaillé pendant quinze ans dans la restauration collective… « Le chiffre, le chiffre, le chiffre ! » était alors une obsession, dont elle ne veut plus entendre parler. Aucun regret d’avoir rejoint en août 2018 le projet Mam’Ayoka « qui place l’humain au cœur de son projet ». En tant que cheffe de cuisine, elle s’assure que les cadences soient respectées, les plats terminés en temps et en heure, et que la bonne humeur règne.
Hannan gère aussi l’équipe composée de dix cuisinières et d’un plongeur. « Il a fallu imposer le français comme langue obligatoire et ça a permis à tout le monde de faire des progrès », affirme-t-elle. Elle sourit en repensant aux débuts timides de Sina, Cambodgienne, qui commence peu à peu à maîtriser le français et à mieux s'intégrer dans cette entreprise collective en pleine croissance.

Un joli succès pour Sophie Lawson, avec toutefois un petit revers de médaille : l’espace commence à manquer…
Mam'Ayoka récompensée par le trophée de l'ESS

Dès 2017, Mam'Ayoka a fait partie des lauréats des Trophées de l'ESS qui récompensent les projets innovants et porteurs de sens pour la ville. En permettant l'insertion professionnelle de personnes éloignées de l'emploi et en proposant des repas équilibrés à un prix modéré, cette cantine solidaire s'inscrit aussi dans une démarche de consommation responsable.

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